mardi 19 juillet 2011

De l'endettement et du jardinage

Cette aventure d’autoédition me fait beaucoup réfléchir sur les questions de l’entreprenariat, de l’argent, de l’endettement. 


Il y a la logique de l’économie d’échelle : si j’imprime 500 livres, chacun revient à 2,30 $ de moins que si j’en imprime 100.  Mais ça ne se vendra pas immédiatement, alors ça veut dire investissement (endettement). Et je dois investir autant d’énergie pour que ça bouge, pour les vendre. Et puis il y a le risque que ça ne se vende pas.


Crédit: Pop Weasle
Il y a la logique « au jour le jour » ou presque : si j’en fais imprimer seulement 100, je n’ai qu’à en vendre 35 pour payer l’impression; plus rapidement, il y aura de l’argent pour rémunérer l’éditrice et l’auteure. S’il y avait plusieurs réimpressions d’une centaine d’exemplaires, ça ferait de l’argent « perdu » en raison du petit nombre. Mais en même temps, jongler avec de petits nombres, c’est beaucoup moins stressant (les projets à échelle humaine ont cela de bon qu’ils permettent plus facilement d’avaler que l’erreur est humaine; quand les projets ont l’envergure d’un stade Olympique, c’est plus difficile). Et l’endettement, ça donne vraiment l’impression de marcher sur un trottoir de coquille d’œuf, avec un grand trou en dessous…  En fait, tout cela me fait penser aux petits marchands et marchandes que j’ai vus au Guatemala : je présume qu’ils vont acheter quotidiennement le contenu de leur petit étalage ambulant; aucune économie de volume – mais de quoi acheter à manger au jour le jour. En espérant qu’ils n’aient pas à s’endetter pour survivre!


Cela m’amène à parler de Congé de cuisine, un restaurant atypique du quartier Rosemont, à Montréal, dont je connais la propriétaire, Patricia Lamas. Elle a choisi de ne pas continuer à travailler en entreprise pour plutôt réaliser son rêve d’être chef d’un resto convivial qui sert de la cuisine concoctée avec soin, avec recherche (et délicieuse!) et où les clients et la chef ont une vraie relation. Au début, les heures du restaurant ressemblaient à ce qu’on connaît normalement, du matin au soir. Elle engageait une serveuse et travaillait elle-même des heures de fou. Et ce n’était pas rentable! Les organismes gouvernementaux qu’elle a consultés lui suggéraient : « Investis 50 000 $ dans la devanture, la décoration et la publicité! C’est ça, la clé! » Elle a plutôt choisi une solution « décroissante » : des heures d’ouverture limitées, pas de personnel à part elle-même jusqu’à ce que ce soit rentable. Afin de pouvoir retrouver un peu d’équilibre et de passer du temps avec sa famille. 


De la même façon qu’on offre des cartes de crédit aux étudiants, il semble qu’en affaires, la règle soit l’investissement. N’est-ce pas d’ailleurs à ça que ça sert, la bourse, les actions? Pour financer anonymement des entreprises, dont finalement on ne sait rien des activités, des impacts environnementaux et sociaux… Un système qui fonctionne sur les dettes, ça fait des diplômés très fortement incités à aller travailler 40 heures semaines, peu importe l’entreprise, en raison des 20 000 $ et plus de prêts étudiants à rembourser. Et parce qu’on a le goût de se les payer, les biens de consommation dont on s’est relativement privé pendant les études. Tout le monde à bord du train-train!


http://www.photo-libre.fr
Serge Mongeau racontait que pendant les années où il a vécu à l’île d’Orléans, il a peu à peu construit un grand jardin. Au départ, la terre n’était pas très fertile, mais à force de l’engraisser avec le compost issu de la consommation de la maison et de la toilette à compost (oui, oui! Je n’ai pas inventé ça, dans Cité Carbone, ça existe pour vrai!), peu à peu, elle est devenue très riche. Il n’a pas fait venir des chargements de camion de terre fertile, ni utilisé d’engrais chimiques. Je trouve l’image intéressante : soit on fait des projets trop gros pour nous, à crédit, et qui peuvent nous déstabiliser, soit on y va petit à petit, on voit comment les choses se font, on apprend, on construit à partir de la base. Ça ne correspond pas au « tout de suite! » qui caractérise notre société. Je me dis que ça ancre davantage dans la réalité, au lieu d’attacher nos rêves à des bulles de mégalomanie qui visent à prouver qu’on est quelqu’un.


Par ailleurs, j’ai été très inspirée par le jardin du Marché solidaire Frontenac, au coin des rues d’Iberville et Ontario. Ça donne une idée de la beauté qu’on peut créer avec somme toute pas beaucoup de ressources : des bacs, un peu de terre, des graines; du savoir-faire, du temps, de la mobilisation. Un magnifique jardin de légumes dans un quartier somme toute pas mal « béton ». J’avais eu le petit contrat, il y a plusieurs années, de prendre des notes pendant une plénière de la Table de concertation et d’intervention pour une garantie alimentaire locale (CIGAL) et il avait été question du manque d’accessibilité des légumes dans Ville-Marie. C’est vraiment stimulant de voir le travail accompli, le processus en route. Bravo! 

En revenant chez moi, j’ai décidé de planter des laitues dans mes bacs à fleurs de balcon. Si ça prend les 45 jours indiqués sur le sachet de graines, ça sortira pour septembre. Oui, il est tard dans la saison. Oui, je suis impliquée ailleurs, autrement, et on ne peut pas tout faire. Mais je trouvais important de commencer maintenant. Commencer petit, tout de suite, aujourd’hui. Pour être en action, apprendre et l’année prochaine repartir d’un peu moins loin. Et nourrir l’enthousiasme!

Je ne suis pas encore décidée, pour le nombre d'exemplaires de la deuxième réimpression. Quelqu'un a des contacts dans les médias qui me permettraient de justifier d'en faire 500? ;)

lundi 18 juillet 2011

Sept bibliothèques de plus

Merci à toutes les personnes qui ont demandé à leur bibliothécaire de commander Cité Carbone: j'ai reçu sept commandes du service aux collectivités de Renaud-Bray! Je ne peux donc pas savoir de quels endroits il s'agit, alors si vous voyez le livre dans votre bibliothèque, je vous invite à me le dire pour que je l'ajoute à la liste présentée sur ce blogue pour les lecteurs éventuels.

Demain, je publie un article qui parle d'entreprenariat, d'endettement et de jardinage.

jeudi 7 juillet 2011

Réimpression! Un franc petit succès

Il ne reste que 10 exemplaires de Cité Carbone dans les humbles bureaux des Humbles Éditions. Un franc succès!

Hi, hi! Small is beautiful, c'est sûr. (Pour ceux qui ne sauraient pas, c'est le titre du livre de E.F. Schumacher, publié en anglais en 1973 avec le sous-titre "A Study of Economics as if People Mattered", sous-titre traduit par "Une société à la mesure de l'homme". Ce qui m'a marqué quand j'ai lu ce livre, il y a plusieurs années, c'est la proposition d'une technologie intermédiaire. Pas besoin de tout faire absolument à la main, mais entre la paire de chaussures absolument unique qui prend deux jours à confectionner et l'usine monstrueuse qui en sort des milliers par jour, on peut avoir un juste milieu, une petite fabrique productive, que les ouvriers seront capables de gérer et de réparer... Fin de la parenthèse.) Donc, un franc petit succès! J'en avais imprimé 200, je serai bientôt sold out. Est-ce que je m'arrête là?

Je suis contente de mon expérience. J'ai été prudente. J'ai rapidement payé l'imprimeur et le graphiste. J'ai même payé un mois de loyer et mon épicerie avec les ventes du livre! Je vous jure, c'est émouvant! Tout comme il est vraiment touchant de recevoir par Internet des commandes de personnes que je ne connais pas!

Et maintenant? Je pourrais en faire imprimer une autre petite quantité, que je vendrais tranquillement. Mais j'ai commencé à faire des démarches pour voir les possibilités d'être distribuée par une compagnie spécialisée, de celles qui s'arrangent pour que les livres soient dans toutes les librairies du Québec. Ce que je trouve intéressant, c'est que le fait d'avoir à mon actif mon franc petit succès, ça me donne espoir que je pourrais être acceptée dans la cour des grands... peut-être. Car quand je mentionne "compte d'auteur", il y a une espèce de petit recul poli dans l'attitude de l'interlocuteur. Je comprends.  À suivre! 

Les compagnies de distribution récoltent 20% du prix de vente du livre, m'a-t-on dit. J'avoue que c'est un peu dur à avaler. Les 40% du libraire, ça se comprend: il faut garder le magasin ouvert, payer le loyer, les employés... Les 30% de l'éditeur m'apparaissent bien petits: 7,50$ sur un livre à 25$, quand l'impression en coûte autour de 5 à 7$! J'imagine que le prix de production baisse considérablement quand on fait des gros tirages, mais à faire ces calculs, on comprend que le monde de l'édition québécoise soit complètement dépendant des subventions! Étant donné que je n'ai pas les avantages du volume, autant dire que j'aurais fait le travail d'édition mais ne toucherait la part de l'auteur, une fois l'imprimeur payé. Je l'ai déjà dit, 10% vont à l'auteur, soit 2,50$ par livre s'il coûte 25$. Alors, le distributeur-diffuseur, qui lui, bien sûr, gère catalogues, relations avec les librairies, employés, camions et entrepôt, se fait tout de même 5$ par livre. Évidemment, c'est plus qu'uniquement du transport, mais ça leur donne quand même 160$ par petite boîte de 32 bouquins! J'avoue que je me sens révoltée en l'écrivant, en ce moment.

Mais je peux aussi voir les choses avec humour: mon tout petit franc succès m'aura peut-être rapporté autant, sinon plus d'argent absolu que si j'avais eu un "vrai livre" en librairie. Selon les sources, on dit qu'en moyenne, un auteur de roman québécois  vend 1200 ou 2000 copies, mais c'est la moyenne... Patrick Dion, sur son blogue, admet 617 copies. Donc, si je me "pars en buisiness" pour le vrai en faisant distribuer Cité Carbone par les réseaux habituels, c'est vraiment pour l'amour de la gloire (!) et pour faire passer le message! Hi! hi!

Bon, j'aurais fait un bout de la réfléxion en public aujourd'hui. J'ai demandé à l'imprimeur une soumission pour 100, 200, 300, 400, 500 copies... À suivre!

lundi 4 juillet 2011

Mobilisation de fraises et vitamine C locale en hiver!

Ma soeur a trouvé la réponse à la question que je me posais dans un billet précédent ("Mon roman me conscientise moi-même"):  Comment ne pas manquer de vitamine C en hiver sans avoir recours aux fruits qui viennent de milliers de kilomètres?

"Cette semaine, en lisant la fiche sur le chou d'un livre de jardinage, je repensais à ce billet. Le chou aussi est riche en vitamine C, pousse bien sous notre climat et se conserve bien en hiver (j'ai déjà entendu parler de l'enterrer dans les bancs de neige pour le conserver!).

Puis, dans un autre livre de jardinage, j'ai trouvé LA réponse à ta question! LA plante que les amérindiens utilisaient! Dans le tome 2 des Coups de coeur du Jardinier paresseux, Larry Hodgson m'apprend qu'ils buvaient des infusions de thuya (qu'on appelle à tort "cèdre"; oui oui, l'arbre avec lequel beaucoup de gens font des haies) et que c'est même ainsi qu'ils ont sauvé Jacques Cartier et son équipage, sévèrement atteints de scorbut. Cartier aurait même introduit le thuya en Europe à son retour, sous le nom d'arbre de vie!"

D'accord, ce n'est pas la saison, mais je voulais mettre en valeur ce petit commentaire génial. En attendant d'avoir à recourir à nos haies pour notre santé, mangeons des fraises du Québec!

Parlant de fraises, avec Aliments d'ici, l'autre jour, en moins de 24 heures, nous avons mobilisé plus d'une centaine de personnes pour acheter 162 caisses (162 fois 12 casseaux) de fraises qu'un producteur biologique de Mirabel devait écouler rapidement. Nos producteurs vivent dans une précarité effrayante: quand leur gros client décide de ne plus acheter leur récolte, ils se retrouvent vraiment mal pris. Notre action aura fait une différence de près de 3000$ pour le producteur! Je suis vraiment contente de participer à renouer les liens entre la Terre et mon assiette, localement. Et quelle joie de voir ce qu'on peut faire, si vite, pour s'entraider. Vive les actions concrètes!  Dommage, je n'ai pas pensé à prendre en photo les colonnes de boîtes de fraises qui ont envahi l'entrée de mon édifice l'espace d'une soirée. Merci au voisinage sympathique et compréhensif!